Avec les nombreux documentaires sur la malbouffe, les scandales de l’industrie agro-alimentaires et leurs effets sur la santé, nous ne pouvons plus dire que nous ne savons pas. Dès lors, bien se nourrir, devient un acte de résistance contre les industriels qui nous préparent la nourriture de demain, donc un acte militant.
Selon un sondage Mediaprism de 2013, 83 % des Français font attention au « caractère naturel » des produits qu’ils achètent et manifestent une perte de confiance envers l’industrie agro-alimentaire pourtant les caddies continuent à être remplis de produits transformés. Question d’habitude ? Question de coût ? Vu les dégâts causés par l’alimentation industrielle (maladies émergentes, allergies, pollution de l’eau et de l’air, maltraitance animale…), s’investir dans le bien manger devrait être prioritaire pour chacun d’entre nous, pour notre santé, la santé de la planète et … le plaisir de nos papilles.
☞ Bien manger, c’est choisir des aliments sains et variés, les moins transformés possibles, beaucoup de fruits et légumes, des céréales, de la viande de bonne qualité, utiliser des cuissons respectueuses, tel est le credo de ceux qui veulent bien se nourrir. Le bio dès lors est une évidence. Un groupe de chercheurs européens a publié en 2014 une étude qui fait date. Elle montre que les fruits et légumes bio ont des concentrations nettement plus élevées en antioxydants, caroténoïdes et vitamines et elle l’explique. Le plus grand nombres d’attaques de ravageurs contre les cultures bio amènerait les plantes à produire ces molécules pour se défendre. En d’autres termes, cela booste leurs défenses immunitaires. Si l’on se réfère au fonctionnement de la chaîne alimentaire, on peut imaginer qu’en les ingérant, cela booste aussi les nôtres. Je précise que cette dernière hypothèse est personnelle.
En France, la consommation des produits frais diminue régulièrement au profit des produits transformés : plats préparés, pizzas, quiches… De nouveaux produits ultra-transformés composés d’ingrédients recombinés au point qu’on ne reconnaît plus l’aliment d’origine apparaissent de plus en plus sur le marché. Pauvres en micronutriments, ils participent au développement des maladies chroniques. Davantage fabriqués en usines ou en labos que dans les champs, ils se reconnaissent à la longue liste d’ingrédients et d’additifs indiqués dans leur composition. Parmi ceux ci, figurent les nanoparticules. De nombreuses études scientifiques montrent que ces substances infiniment petites peuvent franchir les barrières physiologiques de la cellule et se disséminer dans le corps humain et l’environnement. Leurs effets toxiques sont de mieux en mieux documentés : dommages à l’ADN, perturbation du fonctionnement cellulaire, affaiblissement du système immunitaire.
A l’occasion d’Halloween, l’association « Agir pour l’environnement » a enquêté pour estimer au mieux la quantité de confiseries contenant des additifs alimentaires susceptibles de contenir des nanoparticules, majoritairement le dioxyde de titane (colorant E171). Le résultat est inquiétant : plus de 100 produits alimentaires destinés aux enfants ont été identifiés dans une quinzaine d’enseignes de supermarchés : bonbons Têtes brulées, Elodie, Fizzy, chewing-gum Airwaves, Hollywood, Freedent, Malabar, confiseries M&M’s, Skittles, gâteaux LU, chocolats Milka, décorations gâteaux Vahiné…
Et la viande dans tout cela ? On en mange trop et, plus précisément, trop de mauvaise viande, celle issue d’élevages où l’animal n’est qu’une machine à produire du « minerai ». Les tenants de la nouvelle alimentation qui se réunissent chaque année à Orléans dans le cadre de l’open agrifood sous l’égide de Xavier Beulin, patron de la FNSEA et industriel de l’agroalimentaire, nous préparent des demains désenchantés avec notamment de la viande artificielle fabriquée à partir de cellules souches. D’ores et déjà, la viande est l’objet de manipulations pas très ragoûtantes ainsi les saucisses sont fabriquées à partir de VSM (viande séparée mécaniquement) d’une mixture de viande obtenue en passant les carcasses dans une centrifugeuse à haute température. Aux États-Unis, le « lean finely texture beef » (bœuf maigre de texture fine), utilisé depuis quinze ans, est systématiquement ajouté aux steaks hachés. Mais, comme ce hachis liquide provient des parties les plus prédisposées à la bactérie E.coli et aux salmonelles, il est traité à l’ammoniaque. Bon appétit!
Je ne prône pas pour autant de devenir végétarien ou vegan. Jocelyne Porcher, directrice de recherche à l’Institut national de recherche agronomique (INRA) à Montpellier et auteur de plusieurs ouvrages sur l’élevage et les animaux, considère que le système de penser des vegan qui, au nom de la justice et de la morale, ne veulent rien des animaux, ne rien leur donner, ni ne rien leur devoir, sort les animaux du lien social, et conduit in fine à rompre complètement avec les animaux. De plus, cette nouvelle tendance de notre civilisation de plus en plus coupée de la nature, sert les industriels qui savent déjà produire des alternatives à l’alimentation carnée. Le végétarien qui mange des œufs, du fromage et boit du lait ne renie pas l’élevage. De fait, les animaux élevés dans le respect, sont essentiels pour le maintien et l’entretien des paysages. Il est évident que le modèle des fermes usines où les animaux ne vont plus au pré est à bannir. Aussi mangeons de la viande, une ou deux fois par semaine, mais achetons là en circuit court, issue d’un élevage à taille humaine et respectueux du vivant.
Comment s’approvisionner ? L’idéal est d’avoir accès directement aux producteurs mais choisissons exclusivement le bio. Je respecte le travail sérieux de certains éleveurs et maraîchers qui ont opté pour la vente directe mais il faut arriver au zéro phyto au plus vite pour sauver la biodiversité, notre santé et celle de nos enfants et les pousser à passer en bio. Nous connaissons, tous, les circuits vertueux : marchés, AMAP, vente à la ferme, etc. Quant au porte-monnaie, si nos achats sont judicieux, c’est tout à fait soutenable. Le mien n’étant pas très rebondi, je parle en connaissance de cause.
Dernier point, très important, bien manger de cette façon là, c’est anti gaspi. Choisissant la qualité, on est très attentif à sa liste de courses et on ne se laisse plus tenter par ce paquet de chips ou de gâteaux insipides en promo, et on mange tout. Les quelques 40% de nourriture jetée sont assurément un des plus grands scandales de notre société de consommation. Par ailleurs, on le sait, acheter en vrac et à la découpe, réduit considérablement la quantité d’emballages, donc de déchets dont la gestion est devenu un casse-tête planétaire.
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Pour aller plus loin:
☞ Manger écologique ? par Vincent Tardieu, Éd. Belin, 15 €
☞ Quel pain voulons nous ? par Marie Astier Éditions Seuil/Reporterre, 128 pages, 12 €
☞ Le monde n’est pas une marchandise : des paysans contre la malbouffe par José Bové, François Dufour et Gilles luneau. Éd. La découverte, 18 €
☞ Vivre avec les animaux, une utopie pour le XXIème siècle, par Jocelyne Porcher, Éd. La découverte, 8,50 €
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15/01/2011 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte et des photos est soumise à autorisation.