Lorsqu’au lendemain de la tuerie de Charlie Hebdo, j’ai vu tous ces crayons déposés place de la République et que j’ai expliqué à la petite fille de 8 ans qui m’accompagnait que c’était l’outil et l’arme des dessinateurs et des journalistes morts, j’ai pensé que mon outil à moi, c’est aussi un crayon. Écrire est sans doute ce que je sais faire le mieux et à voir, le nombre de visiteurs de ce blog, plusieurs milliers par mois, en perpétuelle augmentation, malgré mon peu d’assiduité cette dernière année et à lire vos commentaires encourageants, je me dis que c’est sans doute là, avec mes mots, que je peux être le plus utile en alertant sur les dérives de notre société, en relayant les actions de ceux qui refusent de baisser les bras, et en continuant à montrer la beauté qui nous entoure même, ou plutôt surtout, si elle se fait de plus en plus ténue, de plus en plus fragile.
☞ Ces derniers mois, je voulais être au plus près du local et agir. Je me suis retrouvée au centre d’une bataille d’égo qui a aspiré toute mon énergie. Le chemin de la vie est plein de détours. Il est sans doute encore trop tôt pour mesurer tout ce que m’a fait découvrir celui ci mais je sais déjà que j’ai beaucoup appris notamment sur moi. Le miroir n’a pas été complaisant mais je me suis efforcée de regarder l’image sans sourciller. Dans le même temps, l’assassinat de mes confrères, la force de Fabrice Nicolino, l’ami qui en a réchappé, sa détermination à être toujours lui-même et à poursuivre son combat envers et contre tout, ont été un autre révélateur.
Au milieu de la foule silencieuse et hébétée, venue se recueillir, espérant peut-être trouver là une réponse à son désarroi, la petite fille a longuement observé les fleurs, les dessins, les bougies et puis, elle a voulu écrire. Oui, mais quoi ? A la question de mon amie, sa maman, qui lui demandait quel était le premier mot qui lui venait, elle a lancé un « liberté » plein d’entrain, magnifique. Tout commence là, par un mot écrit par un enfant! J’aime les symboles. Ils m’ont souvent aidé à prendre des décisions que mon entourage trouvaient folles, irréalistes parce que non conformes, parce que je préférais la liberté à la sécurité, la rébellion à la soumission. En regardant cette petite fille s’appliquer à écrire « son » mot à côté des autres mots qui avaient jaillis comme des sanglots de révolte et de colère, la lumière est venue éclairer mes doutes et j’ai réalisé, que par respect d’un devoir que je m’étais imposé, j’étais en train de perdre ma liberté. Mais cette pulsion de vie qui m’a tant de fois sauvée de l’enlisement a fusé de nouveau. Je ne sais pas encore où elle va me mener, mais je sais que je vais de nouveau de l’avant.
…
26/01/2015 © Danièle Boone. Toute utilisation même partielle de ce texte est soumise à autorisation.