Jardin : l’expérience de l’aléatoire

C’est la cinquième année que je fais un potager. Il m’est difficile de tenir compte de l’acquis des saisons précédentes tant celles-ci sont différentes. A l’été pluvieux et le mildiou des tomates de 2014 succède un été désespérément sec. Même arrosés, les légumes souffrent.

Après les altises qui ont détruits les capucines qui commencent seulement à s’en remettre sous leur filet anti-insectes, les aleurodes qui ont envahi les choux, les carottes et les aubergines, voilà les campagnols. Il me semblait commencer à voir diminuer notablement les taupins qui vouaient à l’échec toutes mes tentatives d’avoir des salades, je n’imaginais pas cette calamité d’une bien autre ampleur qui affecte la jardinière en herbe que je suis encore. Adieu, le beau rang de carottes qui était si bien parti, adieu, les fenouils, adieu, les betteraves, adieu aussi les navets qui venaient d’être semés sans compter les artichauts que j’ai fini par mettre dans des pots tant ils avaient envie de vivre. Les racines grignotées, presque en dehors de la terre, tout flétris, il me suffisait de les remettre en terre, et de les arroser pour qu’ils repartent jusqu’à l’attaque suivante! Aujourd’hui, c’est un magnifique pied de potimarron qui vient de rendre l’âme.

☞ J’ai acheté des pièges Supercat, soi-disant le Top, mais je ne dois pas savoir faire. J’essaie de relativiser. Je pense à ces paysans d’Afrique qui voient leur récolte disparaître avec un vol de criquets, je pense à ces petits paysans du Bengladesh qui constatent l’anéantissement de leurs efforts avec la crue. J’imagine leur désespoir car c’est la vie de leur famille que le fléau remet en question. Je pense à tous ces endroits où il est difficile de survivre à cause des catastrophes climatiques qui sont appelées à se multiplier, à cause des guerres qui perdurent depuis l’origine de l’humanité. A mon petit niveau, dans mon coin de Berry, je me dis que si nous n’avions pas tellement perturber les équilibres naturels, les prédateurs, renards et rapaces, réguleraient les populations de ces petits rongeurs qui n’auraient pas besoin de se réfugier dans les oasis que représentent pour eux les jardins.

Pour moi qui désire arriver à une autonomie alimentaire au niveau des fruits et légumes, c’est un rude coup et  aussi une leçon de modestie. Idéologie et pratique ne s’accordent pas toujours. Mieux vaut essayer de rire de ma naïveté et, il faut le dire, d’une certaine prétention. La nature si maltraitée par l’homme reste impossible à maîtriser et c’est très bien comme cela mais l’expérience de l’aléatoire est difficile. Cela dit, je ne renonce pas à mon objectif même s’il est probable que, cette année, je serai une bonne cliente pour mon maraîcher bio!

20/07/2015 © Danièle Boone