Voilà un livre paru chez Actes Sud à découvrir absolument au seuil d’une nouvelle année, moment traditionnellement plein de bonnes résolutions. C’est quoi l’économie symbiotique ? Une économie qui couple les activités humaines avec la croissance des écosystèmes et des liens sociaux, nous explique Isabelle Delannoy. La richesse naît de la coopération et non plus uniquement de la compétition. L’horizontalité et la gouvernance coopérative sont à la base de cette nouvelle économie en émergence dans le monde entier. C’est assurément une vraie révolution, une autre façon de voir et de vivre la vie qu’il faudrait appliquer au plus vite.
☞ Isabelle Delannoy, ingénieur agronome, a mis en évidence six principes : collaboration libre et directe entre entités; diversité d’acteurs et de ressources respectant l’intégrité de chaque entité; territoires de flux communs, accessible à tous de façon égale; utilisation prioritaire des services rendus par les écosystèmes; recherche de l’efficience maximum dans l’utilisation des ressources; recherche de l’inscription des activités humaines dans les grands cycles de la planète préservant son équilibre écologique global. Plus l’homme produit selon ces principes, plus il est capable de régénérer ses ressources. Agroécologie, permaculture, ingénierie écologique, monnaies complémentaires et électroniques, biomimétisme sont autant de pièces d’un puzzle qui entrent dans cette économie alternative et régénératrice. « L’économie symbiotique n’est encore qu’une hypothèse, précise l’auteur. Je n’ai encore vu nulle part l’ensemble de ces principes assemblés. Mais là où certains le sont, les synergies prévues s’expriment. »
Actuellement, nous avons une relation parasitique avec la Terre. Notre société est extractive mais selon Isabelle Delannoy, nous sommes désormais capables de tourner le dos à ce passé. Pour elle, il est possible de construire une nouvelle prospérité en tirant nos ressources du vivant, en lui appliquant notre intelligence, mais aussi en s’inspirant du fonctionnement non hiérarchique des écosystèmes. Exemple : l’implantation dans les villes des écosystèmes pour gérer les eaux comme à Nanterre avec le parc du Chemin de l’Île. On passe ainsi d’infrastructures industrielles « grises » à des infrastructures « vertes » vivantes, dynamiques, mouvantes et fertiles qui transforment en profondeur le vécu de la ville.
Isabelle Delannoy prône les réseaux et le premier d’entre eux, internet, comme moteur d’échange, de circulation de l’intelligence notamment avec l’open source. Elle dénonce toutefois la gabegie actuelle. « Les quelques 500 000 data centers existant dans le monde consommerait entre 200 et 275 milliards de kilowattheures d’électricité par an, soit l’équivalent de la production de vingt à trente réacteurs nucléaires. La moitié de l’énergie consommée par les centres de données l’est pour refroidir les bâtiments et acheminer les données. Ils seraient ainsi responsables de 2 % des émissions mondiales de dioxydes de carbone. » Mais là aussi, l’économie symbiotique pourrait fonctionner avec, par exemple, les nouvelles utilisations des data centers couplés à des serres, au chauffage de bureaux ou pour chauffer de l’eau. Dans le dernier chapitre intitulé « Je vous écris de ma ville symbiotique », l’auteur imagine ce que pourrait être une ville dans ces conditions. Ça fait rêver !
Actes Sud, Domaine du possible, 352 pages, 22 € – www.actes-sud.fr
27/12/2017 © Danièle Boone