Mille étangs… Vous voulez rire, c’est juste pour l’image. La Brenne en compte au moins le double, pour la plupart privés. Ils sont traditionnellement utilisés pour la pisciculture et sont pêchés d’octobre à mars. Les plus anciens dateraient du XIIème siècle. J’avais envie depuis longtemps de découvrir ce fabuleux labyrinthe d’étangs, de forêts et de landes au centre de la France alors j’ai profité d’une sortie organisée par le Corif (Centre Ornithologique d’Ile de France).
La Brenne est un paradis pour bon nombre d’oiseaux dont certains comme le vanneau sociable, le vanneau à queue blanche ou la pie-grièche à tête rousse sont des raretés que nous avons eu la chance de pouvoir observer, guidé par Fabrice Ducordeau, l’initiateur de cette escapade de quatre jours, un super ornitho et un naturaliste très averti. Nous avons observé plus de cent vingt espèces d’oiseaux et aussi des mammifères, des amphibiens, des papillons, des libellules et une foultitude d’insectes et autres araignées. Nous avons aussi pris le temps de nous asseoir au bord de l’eau à contempler paisiblement le coucher du soleil. Et c’est là que sur l’autre rive est apparu le renard et, une autre fois, une biche. Fugace vision d’Épinal d’autant plus magique et précieuse qu’elle est rare.
Le héron pourpré a quelque chose de reptilien avec son bec tendu et ses yeux fixes. Son harpon est une arme redoutable pour capturer grenouilles, gros insectes et petits poissons. La Brenne compte une bonne centaines de couples de cette espèce rare et menacée dans toute l’Europe. Nous l’avons rencontré à maintes reprises. Nous l’avons même vu se débattre pour avaler une grosse grenouille qui a déformé son cou au moment du passage. Contrairement à son cousin cendré, le pourpré est un migrateur qui revient d’Afrique tropicale courant avril.
Le spectacle est au rendez-vous. En permanence. Ici ce sont des grèbes huppés, adulte et jeune (au premier plan) qui se toilettent. Là, ce sont les guifettes moustacs. Ces oiseaux élégants emblématiques de la Brenne nichent sur les nénuphars. C’est un plaisir extraordinaire de les voir chasser et nourrir leurs petits. Ailleurs, c’est un crabier chevelu qui prend le frais en fin de journée au bord de l’eau; un râle d’eau qui, à chaque prise, se précipite dans les roseaux pour dévorer sa proie à l’abri des regards; un blongios nain, un bihoreau ou un héron garde-bœufs sans oublier les mignonnes petites bergeronnettes, les rousseroles, les phragmites, les gobemouches et toutes sortes de mésanges. Et dans le ciel, c’est la ronde des rapaces, des buses, des milans noirs, des crécerelles mais aussi des bondrées apivores et même le circaète Jean-le-Blanc… Le soir, c’est l’engoulevent et son cri si étrange. Je ne l’avais jamais entendu ou alors je ne savais pas ce qu’était ce bruit « mécanique ». Nous l’avons même vu voler passant au raz de nos têtes alors que nous étions immobiles dans une clairière.
On croise souvent au bord des routes brennoises un panneau triangulaire avec une tortue c’est que, ici, c’est le royaume des cistudes. Ces extraordinaires tortues d’eau douce aiment les bains de soleil au bord des étangs et, de préférence, sur une souche. Les meilleurs perchoirs attirent de nombreux individus qui peuvent s’installer les uns sur les autres.
Ces jolies fleurs aquatiques sont… carnivores! L’utriculaire commune doit son nom à ses feuilles en forme d’outres (utriculus en latin) qui piègent les animaux. De fait, c’est une mécanique très subtile. L’utricule est fermée par un clapet muni de cils sensibles. Qu’une puce d’eau s’y frotte et, paf, le clapet s’ouvre vers l’intérieur où elle est aspirée. Le clapet se referme immédiatement. La plante secrète alors des sucs qui vont lui permettre de digérer l’insecte prisonnier.
Ce couple de demoiselles s’apprête à l’accouplement. La femelle maintenue au niveau de la nuque par les pinces de son amant, doit replier son abdomen pour recueillir son sperme. Les spermatozoïdes étant produits à l’extrémité de son abdomen tandis que son sexe se situe au niveau du thorax, le mâle s’est préalablement contorsionner pour transférer sa semence. Au moment suprême, les deux corps enlacés prennent la forme d’un cœur. N’est-ce pas le comble du raffinement? Le « mâle » reste et protège la femelle jusqu’à la ponte. De fait, il surveille jalousement la transmission de ses gênes car madame est volage.
A quelques centimètres des demoiselles, une minuscule rainette verte se planque dans les herbes, accrochée à une tige. Grâce aux disques adhésifs du bout de ses doigts, elle grimpe aisément. Cela lui permet de trouver la position stratégique pour capturer les insectes volants.
S’arrêter et scruter quelques instants les herbes, c’est le meilleur moyen de découvrir plein de choses. Tout prêt de la rainette, voilà l’argiope. Cette jolie araignée jaune et noire est une épeire fasciée. Sa toile circulaire est renforcée par un dispositif en zigzag typique. L’argiope se tient à l’affût au milieu de sa toile dans la basse végétation. Bien qu’elle ne mesure que deux centimètres, elle parvient à capturer des criquets et des sauterelles. D’ailleurs, une inconsciente est dans les parages.
La sauterelle use et abuse du mimétisme pour disparaître au regard de ses prédateurs. Ah, au fait, savez-vous reconnaître une sauterelle d’un criquet. Facile, la première a de longues antennes. Celle du second sont toujours plus courtes que son corps. La femelle sauterelle possède un ovipositeur bien visible sur la photo, sorte de sabre situé à l’arrière du corps qui lui sert à pondre. Chez les criquets, il est beaucoup plus discret. Autre différence, les sauterelles omnivores mangent des insectes tandis que les criquets sont végétariens.
Côté mimétisme, j’ai été scotchée par cet agrion qui se confond avec les aiguilles de sapin. Si je ne l’avais pas vu se poser, j’aurais moi aussi été abusée.
Un couple de punaises arlequin s’accouple sur une ombelle pas encore ouverte de carotte sauvage. C’est fou ce que ces plantes peuvent attirer comme insectes. Complètement épanouie, elles servent de piste d’atterrissage à de nombreux petites bêtes volantes. Les cantharides fauves s’y reproduisent aussi. Aucun mal pour les surprendre en délit de copulation. Ils ont l’air de ne penser qu’à ça!
D’un étang à l’autre, nous longeons les haies. Certes, nous sommes venus pour voir les oiseaux – nous avons pu observer plus de cent vingt espèces – mais nous prenons plaisir à découvrir toutes les formes de vies. Et côté papillons, nous avons été gâtés.
L’amaryllis apprécie tout particulièrement les fleurs des ronces. Il butine fréquemment avec d’autres individus de son espèces.
Le souci, petit elfe jaune, batifole d’une fleur à l’autre avec ses congénères. Il se pose presque exclusivement les ailes fermées.
Le flambé est incontestablement l’un de nos plus beaux papillons. Il affectionne tout particulièrement les prunelliers. Ces arbustes sont courants en Brenne ce qui est loin d’être le cas dans toutes les campagnes à cause de la disparition des haies. La chenille du flambé sait se contenter de certains arbres fruitiers mais là, ce sont les insecticides qui font des ravages. Du coup, ce beau voilier expert en vol plané fait partie des espèces sensibles. Il est protégé dans plusieurs pays d’Europe.
Le sphinx gazé est l’un de nos rares papillons à avoir les ailes dépourvues d’écailles. C’est pourquoi elles sont en partie transparentes. Son corps est couvert de poils visibles à l’œil nu. Prenant appui sur le bord de la fleur avec ses pattes postérieures, il plonge sa longue trompe qui lui permet d’explorer les corolles profondes.
A la fin du dernier pique-nique auprès de l’étang des Loges, nous avons découvert ce crapaud commun, joli cadeau de la nature avant notre retour à Paris. Savez vous qu’il avale avec les yeux? Dépourvu de dents et de salive, il commence par écraser sa proie sur son palais. Ensuite, il ferme les yeux et les rentre dans leur orbite pour s’aider à déglutir. Des chercheurs américains ont découvert cet étrange phénomène grâce à des vidéos réalisées aux rayons X. Les grenouilles et les tritons avalent aussi de cette façon.
Y aller: Autoroute A10, A71, puis A20 jusqu’à Châteauroux puis D925 direction Châtellerault
Hébergement: Il existe plein de gîtes mais le Village Vacances Nature situé en bordure de l’étang de Bellebouche est une base parfaite pour visiter la Brenne. ☞ En savoir plus
A ne pas manquer:
• La réserve de Chérine (observatoire) avec la Maison de la Nature et de la Réserve (excellente librairie)
• La maison du Parc naturel régional de la Brenne à Rosnay (boutique, expo et restau)
• L’étang de Purais qui appartient à la LPO. Les nénuphars l’ont recolonisés pour le plus grand bonheur des guifettes.
S’informer:
Parc naturel régional de la Brenne
Comité départemental de tourisme
18/07/2009 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte et des photos est soumise à autorisation
Parc Naturel de la BRENNE
Je n’ai pas noté dans vos activités la fonction de guide nature et voyage que vous pourriez aussi remplir..!!
Je suis sur la page de la Brenne, peut-être pourriez vous me donner le nom d’un guide ornitho de la Brenne.
Merci et bravo pour ce que vous faites
Réponse: Guide nature et voyage est un métier. Ce n’est pas le mien. Pour ce qui concerne un guide ornitho, je n’ai pas de réponse mais je pense que la maison du Parc pourra vous aider.
Bonjour,
Il est important de pouvoir préserver des sites comme celui-ci.
Actuellement nous nous battons pour faire échouer des projets éolien industriel (150 mètres de haut) dans le parc naturel régional de la brenne.
malgré de nombreux avis défavorable (commission des sites et paysages, LPO , parc…) les élus s’entêtent à maintenir les projets.
tout aide sera la bienvenue.
Association de Défense de l’Environnement de Sauzelles et Alentours
2 Chemin de Chenevières
36220 SAUZELLES
ADESA – blog : adesa.sauzelles.over-blog.com – mail : adesa.sauzelles@hotmail.fr
Après avoir tellement entendu parler de cette région je suis parti la visiter. Elle est belle et sauvage. Par contre moi qui voulais photographier la faune et les oiseaux, j’ai été un peu déçu. La plupart des étangs sont privés et interdits au public. wce sont des réserves de chasse et pêche, et seuls les chasseurs et les pêcheurs y ont accès pendant la saison. Il y a du barbelé partout et on m’a conseillé.
Je ne m’attendais pas à trouver beaucoup d’activité au mois de Juillet et c’était le cas.
Par contre pour passer de très bons moments dans une nature presque à l’état pur, c’est magnifique.
Calme et volupté garantis.
Je recommande vivement l’hébergement à l’Auberge de la Gabrière. Très bonne cuisine et très bonne situation. Les prix sont modérées. 62€ en pension complète.
Une voiture est indispensable pour parcourir les étangs.
J’ai fais la connaissance de la Brenne hier soir avec l’émission de FR 3 « Des racines et des ailes » qui a merveilleusement traité ce sujet.
Bravo de conserver ce site naturel, riche en réserve d’oiseaux et autres espèces, qui ont bien du mal à trouver un peu de nature où nicher et se reproduire;
Merci à celles et ceux qui qui œuvrent afin que ce site soit préservé pour que nos enfants et petits enfants puissent en bénéficier.
Merci je me suis régalée. Mes yeux sont rassasiés et ma tête est remplie de belles images.
Il y a eu un article sur une « certaine écrevisse » qui détruirait les étangs? Comment la reconnaitre ? la voir?
C’est une très jolie réserve.
Merci de la protéger.