Marche avec les loups


D’abord de splendides images sur la vallée où Jean-Michel Bertrand a pu observer le comportement des louveteaux, chaque été, pendant trois ans. Entourés et choyés par les membres de la meute, leur arrivée enclenche un processus de remplacement essentiel : Les jeunes de l’année précédente, les subadultes vont devoir céder leur place et quitter la protection de la meute. C’est pour en savoir plus sur le devenir des ces jeunes loups solitaires que Jean-Michel Bertrand a décidé de partager le voyage de l’un d’entre eux, et d’en faire le sujet de ce nouveau film. C’est, de fait, une invitation à s’émerveiller de la beauté de la nature sauvage et à sentir le monde à la façon d’un loup solitaire.


☞ Les seuls endroits où les jeunes loups peuvent quitter la vallée, ce sont quatre cols. Pose de caméra, déclencheur automatique et alertes sur le smartphone. La technologie est la bienvenue mais elle n’évite par l’attente. Le spectateur entre, lui aussi, dans ce temps suspendu. Enfin le jeune loup finit par se présenter. La neige aidant, nous voilà parti sur ses traces. Bien peu de candidats à la dispersion vont survivre et fonder à leur tour, une meute. Le jeune solitaire rencontre bien des dangers notamment les meutes déjà constituées qui ne tolèrent pas d’autres individus, les routes meurtrières, les villes. Certains humains portent en eux une haine effrayante : avec le retour du loup la peur du sauvage ressurgit. Pourtant à voir les images de cette nature sauvage si belle, les chamois, les marmottes, les bouquetins, les martres, on s’émerveille devant cet équilibre. Mais comme le dit Jean-Michel Bertand, « on a peur que de ce qu’on connaît pas. »


La quête du réalisateur le mène dans le Jura, un paysage nouveau, une forêt qu’il doit apprivoiser. Les animaux sont globalement les mêmes que dans les Alpes mais dans d’autres paysages. Toutefois, il y a la présence d’un autre prédateur mythique absent des Alpes : le lynx dont on peut voir de splendides images.


Jean-Michel Bertrand s’installe dans l’une de ces cabanes mise à disposition des marcheurs dans le Jura. Il y a là, dans une boîte, un cahier avec des notes naturalistes et une biographie de Robert Hainard. C’est l’occasion pour Jean-Michel Bertrand de rendre hommage à ce grand naturaliste. Son attente sera payante : deux loups sont bien là. Un jeune couple peut-être. L’un des deux pourrait être le jeune loup dans les pas duquel il s’était lancé. Après quelques jours d’observation, c’est sûr, une nouvelle meute est en train de naître. Et ce sont les premiers loups du Jura ! Son intuition basée sur sa connaissance du loup était bonne !

Penser que pour ce film la mobilisation des anti-loups a été d’une violence inouïe, Jean-Michel Bertrand a même reçu des menaces de mort, en dit long sur le clivage qui sépare la société entre ceux qui ont peur de la nature et veulent à tout prix la contrôler et ceux qui la connaissent et l’aiment. Cela en dit long aussi sur l’intolérance et le manque de bienveillance entre humains mais aussi envers tout le sauvage qui  ne cessent de s’intensifier dans ce modèle de société aux abois.

Production Jean-Pierre Bailly – MC4
Distribution : Gebeka Film

11/02/2020 © Danièle Boone