No land’s song

Sara NajafiInterdire aux femmes de chanter sur scène en soliste semble impensable, pourtant c’est la réalité en Iran. La raison ? Les voix féminines « excitent beaucoup trop les hommes sexuellement ».  Nous trouvons cela totalement forcément ridicule et humiliant pour les femmes. Sara Najafi, compositrice, aussi. C’est pourquoi, en 2009, elle décide d’organiser un concert officiel pour les femmes solistes en faisant monter sur scène Parvin Namazi et Sayeh Sodeyfi, deux iraniennes mais aussi, Élise Caron et Jeanne Cherhal, deux françaises, ainsi que Emel Mathlouthi, la jeune chanteuse tunisienne qui s’est fait connaître lors du printemps arabe. ☞ lire la suite

concert☞ De fait, l’objectif de Sara Najafi est de défier le pouvoir de la censure. Son frère, Ayat Najafi, filme son parcours. Il la suit notamment jusqu’à l’entrée du ministère de la Culture et de la Guidance islamique. Un micro caché sous son corsage enregistre les échanges surréalistes entre les autorités religieuses et cette femme obstinée. Elle reste polie et calme mais le découragement est souvent au rendez-vous. L’incertitude demeure jusqu’au dernier moment : quelques heures seulement avant le concert. Mais Sara et ses invitées tiennent bon. Le concert a lieu et c’est magnifique.

Le film ne fait pas que dénoncer. Il rend aussi hommage aux grandes chanteuses d’avant la révolution que l’on découvre à travers d’émouvantes archives. On y voit Delkash qui osait, dans les années 60, chanter l’ivresse en robe moulante et petit verre d’alcool à la main ainsi que la divine Qamar ol-Molouk Vaziri, surnommée la « reine de la musique persane », qui, dans les années 20, chantait sans voile au Grand Hôtel de Téhéran.

Affiche No land's songNo Land’s song est diffusé dans le monde entier. Il a d’ores et déjà obtenu le prix du meilleur documentaire au festival des films du monde de Montréal mais le film qui s’adresse d’abord aux iraniens et surtout aux iraniennes n’est pas diffusé en Iran. Sara Najafi qui a réussi son pari de raconter la censure de l’intérieur et de montrer que, certes avec beaucoup de patience, on peut la combattre, espère que des versions pirates pourront circuler.

Vous l’avez compris, j’ai adoré ce film et vous le recommande expressément.

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07/04/2016 © Danièle Boone