Ce qui se passe au Japon nous bouleverse et nous fait peur. Comment ce peuple qui a connu Nagasaki a-t-il pu s’engouffrer dans le nucléaire malgré un territoire à risque majeur ? La question me trotte dans la tête depuis l’annonce de la catastrophe. Une ébauche de réponse m’est apparue, d’un coup, et comme souvent, à partir d’un tout autre sujet : notre dépendance aux machines. N’y aurait-il pas eu pour les japonais, matière à résilience dans la maîtrise de la technique nucléaire qui les avait si profondément blessés ? Mais, n’est-ce pas, plus simplement, l’ivresse de tous les humains ?
De Nagasaki à Fukushima, de 1945 à 2011, nous n’avons pas cessé de construire des machines de plus en plus sophistiquées persuadés que leur puissance était notre puissance. En les dotant de mémoire, nous les avons même rendu intelligentes à tel point qu’elles finissent par nous échapper de plus en plus. Nous sommes, à notre insu, tombés de Charybde en Scylla : en voulant nous libérer de notre condition animale, nous sommes devenus les esclaves de ces monstres à bien des égards fascinants. Personnellement, si je sais encore visser une vis sans visseuse – ce qui est de plus en plus rare – je ne vois vraiment pas comment je me passerai de mon ordinateur!
Piégée, je le suis donc comme nous tous. L’homme dans sa folie dominatrice a espéré échapper à sa condition. Nos échecs actuels (épuisement des énergies fossiles, pollution) ajoutés aux déchaînements de la nature devraient nous ramener à plus de modestie. Mais en Libye, on prépare une nouvelle guerre même si on ne l’appelle qu’intervention militaire, avec l’utilisation probable des mêmes armes à uranium appauvri qu’en Irak, les industriels du pétrole veulent exploiter nos sous-sols, les industries pharmaceutiques veulent s’accaparer les plantes, ceux de l’agro-alimentaire de la totalité des semences… et aucun individu ne veut céder d’un pouce sur ce qu’il croit être son petit confort : consommer, consommer, consommer, ce que d’autres appellent le progrès !!! Alors je suis entre colère et tristesse. Combien faudra-t-il donc de Fukushima pour retrouver simplement le bon sens ?
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