Décroissance ou croissance verte ?

Le 16 septembre 2010, Jean-Claude Noyé, administrateur des JNE (Association des journalistes pour la nature et l’écologie) a réuni pour en débattre Bettina Laville, avocate, conseiller d’Etat en disponibilité, fondatrice et présidente d’honneur de Comité 21, Philippe Bodard, maire de Mûrs-Erigné (PS), Serge Lepeltier, maire de Bourges (Parti radical), Vincent Liégey (Parti de la décroissance) et Jean-Paul Morel qui représentait Jacques Boutault (Les Verts), qui nous recevait en sa mairie du 2ème arrondissement de Paris.

Jean-Claude Noyé et Carine Mayo, présidente des JNE, qui animaient la soirée, ont d’abord posé des questions aux invités afin de préciser le sujet du débat. Vincent Liégey et Philippe Bodard ont ouvert l’exercice. Comment définir la décroissance et le mot est-il heureux leur a t-on demandé. « Ce terme est volontairement provocateur pour remettre en cause l’imaginaire occidental et nous aider à nous poser les bonnes questions », explique le premier. Le second dit ne pas bien connaître le mouvement mais partage l’idée de la nécessité d’un retour à la simplicité et à la sobriété. « Au nom de la croissance, on tue l’homme. ». Le credo politique de ce profond admirateur de Pierre Rabhi est humaniste. Homme de terrain, il a instauré les cantines scolaires bio en s’appuyant sur l’économie locale. Il a également favorisé la création d’Amap et s’est engagé sur le 0% de pesticides dans sa commune.

Et le développement durable ? Peut-on y croire ? La question est posée à Bettina Laville et à Serge Lepeltier. « Ce n’est pas parce que le green washing existe qu’il faut rejeter le concept » constate la première. Cette championne de l’éloquence a redit l’histoire en repartant des fondamentaux de Ivan Illitch et d’André Gorce développés dans les années soixante-dix. « Tout le monde tourne fou, tout le monde le sait. Il faut changer ». Pour elle, la décroissance est un mouvement passionnant mais pour aller plus loin, il lui faut abandonner ce terme qui fait grincer, « invendable en politique » renchérit Serge Lepeltier. Ce dernier a courageusement défendu sa position (il croit les limites très éloignées) alors que la salle croit plutôt à l’urgence. L’élu de Bourges mise sur les emplois verts pour soulager l’économie. Très attaché à la notion de liberté individuelle (qui sous-entend la liberté de consommer), il suggère une nouvelle orientation du débat autour de décroissance et démocratie.

« Le développement durable est du marketing politique » martèle Vincent Liégey. « Il faut faire un pas de côté et sortir des schémas traditionnels pour avoir une chance de sortir de l’impasse. On a envie de se réapproprier nos choix, de donner du sens à notre vie. » De quelle décroissance parle-t-on a demandé quelqu’un dans la salle ? De l’empreinte écologique ? Du PIB ? De l’émission des gaz à effet de serre ? De la consommation d’énergie ? Et c’est là, la richesse et la faiblesse de la discussion qui est partie un peu dans tous les sens. Ce débat d’idées ne traduit-il pas notre incapacité à agir? Les grands changements de l’histoire ont toujours été le fruit de crises profondes, ont constaté tous les invités. Le chemin risque donc de nous être imposé. La crise a d’ores et déjà contraint  à une baisse de la consommation. Le début de la décroissance ? Mais faut-il donc que l’enfantement se fasse toujours dans la douleur ? Ne pourrions-nous pas prendre en main notre destin ? Le débat reste ouvert.

Ce texte est paru sur le site des JNE

07/10/2010 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte est soumise à autorisation 

Une réflexion sur « Décroissance ou croissance verte ? »

  1. L’enfantement se fait souvent dans la douleur, car la douleur reste le seul signe qu’on entende lorsqu’il devient un signal d’alarme
    mais ceci dit peut être existe-t-il déjà des prémices de changements systémiques mais qu’on ne peut globalement voir car allant à l’encontre de la finalité exprimée du système actuel ?

    « Don’t waste any time mourning. Organize ».(Ne perdez pas de temps à pleurer. Militez! nous disait Joe Hill)

    Chaleureusement

    Frédéric

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