La nouvelle est tombée ce jour : le préfet des Bouches-du-Rhône a signé hier un décret autorisant la société Altéo à rejeter dans la mer « des effluents aqueux dépassant les limites réglementaires » pour six nouvelles années. Depuis près de 50 ans, ce site de production d’alumine qui sert à fabriquer de l’aluminium situé à Gardanne, près d’Aix-en-Provence, bénéficie d’un droit d’expédier en mer ces résidus, à 7 km au large de Marseille et Cassis. Plus de 20 millions de tonnes de boues rouges ont été ainsi déversées sur les fonds marins de la fosse de Cassidaigne dans le Parc National des Calanques.
☞ Lorsque Altéo a fait sa demande de renouvellement de son autorisation, les associations de défense de l’environnement et de riverains ont protesté. Fin novembre, Ségolène Royal avait déclaré qu’elle n’était « pas favorable au renouvellement » de l’autorisation de ces rejets. Dans son communiqué, la préfecture indique que « ces rejets seront soumis à diverses prescriptions réclamées par le Parc naturel des Calanques et résultant des avis du CODERST (Conseil départemental de l’environnement et des risques sanitaires et technologiques) et du CSPRT (Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques), de façon à pouvoir les ramener dans ce délai au niveau réglementaire« . C’est sûr, on est rassuré ! De fait, les boues bourrées de titane, d’uranium et autres métaux lourds vont désormais être compactées et, économie circulaire oblige, être recyclées dans des matériaux de construction. Ainsi, ce qui va est rejeté maintenant, ce sont les eaux de lavages. Les rejets sont donc plus propre qu’avant mais restent néanmoins pollués.
Ce nouveau triste épisode, quelques semaines après la COP21, montre encore une fois l’insupportable décalage entre les paroles et les actes de nos gouvernants. On notera aussi cette belle manière de balancer cela entre Noël et Nouvel an, pour tenter de faire passer inaperçu une politique du fait accompli. Et, cerise sur le gâteau, cela se situe dans un espace protégé ! Mais il est vrai que si le Parc des Calanques a fini par naître après des années de batailles, ce fut au prix de pas mal de compromissions. La décision du préfet Stéphane Bouillon est sans doute aussi une compromission en réponse au probable chantage pour l’emploi de Altéo. Mais à y regarder de plus près, c’est un faux prétexte.
Lorsqu’une entreprise gagne à se délocaliser dans les pays émergents, elle n’hésite pas à sacrifier des centaines voire des milliers d’emploi. C’est donc bien facile d’utiliser la menace de disparition d’emploi pour ne pas être dans les « niveaux réglementaires » dès maintenant. Cela autorise toutes les dérives avec, en plus, la bénédiction des autorités. Alors pourquoi les industriels feraient un effort ? Les dés sont pipés mais comme je le dis souvent sur ce blog, ce n’est pas une raison de baisser les bras. Plus que jamais, il est évident que les réponses ne peuvent venir que de la société civile qui doit s’organiser, se faire entendre, voire désobéir.
Sources AFP
29/12/2015 © Danièle Boone