Qui es-tu Renard ? demande la Salamandre. Le Goupil en couverture nous regarde droit dans les yeux. Un superbe portrait signé Fabien Gréban. Cela fait vraiment plaisir de voir un vrai bon dossier sur notre mal aimé. Julien Perrot et Jacques Rime nous raconte en mots et en image leurs rencontres avec le rouquin dont la réputation est sulfureuse depuis toujours. Dans les fables du monde entier, il est un malin, gredin, parfois pendable qui s’en sort toujours.
☞ Pour les chasseurs, il reste le mangeur de poules et de petits gibiers, le transmetteur de l’échinococcose, bref l’ennemi public n°1 à éradiquer absolument. Pour cela, il est classé nuisible sur tout le territoire hormis Paris, la Corse et la Savoie. Ce concept de « nuisibilité » n’a aucune base scientifique, c’est un statut juridique contestable attribué au renard et à certains autres animaux comme la fouine, le putois, le corbeau, la corneille, la pie, etc. Qui décide ? Tous les trois ans, dans chaque département, les services préfectoraux examinent les fiches de dégâts agricoles qui leur ont été transmises par les éleveurs ou les agriculteurs. Si la liste des déprédations lui paraît solide, le préfet motive une demande de classement comme nuisible au Ministère de l’Écologie qui confirme le jugement. Mais les dés sont pipés. Ces fiches, souvent fortement sollicités par les fédérations de chasse ou les associations de piégeurs, ne font l’objet d’aucun contrôle scientifique. Ainsi, les charges contre le renard peuvent facilement s’accumuler contre le renard et les autres dits nuisibles. Je le sais car je participe à cette commission en tant que représentante d’une association de sauvegarde de la nature. Il y aurait également à dire du côté des votes car le choix des votants globalement pour ou contre est déséquilibré au profit de ceux qui sont d’évidence pour ce classement.
La Salamandre rapporte une action menée dans les Vosges où 6000 renards sont tirés à balle chaque année et 1000 autres, piégés, agonisent dans des conditions peu enviable. « Ce printemps, sous l’impulsion de Claude Maurice d’Oiseaux-Nature, un collectif de cinq associations de défense du renard avec l’aide de scientifiques et des photographes naturalistes vosgiens Vincent Munier et Fabrice Cahez. Cette levée de boucliers a permis d’obtenir le soutien de deux des quatre députés du département et d’aller plaider sa cause jusqu’au ministère de l’Écologie pour demander simplement qu’il quitte ce statut moyenâgeux de nuisible pour celui d’espèce chassable, ce qui lui donnerait 5 mois de répit par an. Peine perdue. Un recours a finalement été déposé au Conseil d’État avec le mince espoir qu’il fasse jurisprudence… mais il a été rejeté fin juillet. » J’aime faire remarquer qu’un autre rouquin, l’écureuil a été classé nuisible jusqu’en 1976 ! On lui reprochait de détruire les nichées!!! On voit bien dans cet exemple toute la stupidité et l’arbitraire de ce classement.
De fait, les prédateurs dont fait partie le renard ont leur raison d’être dans la chaîne alimentaire puisqu’ils régulent les proies. S’ils disparaissent, c’est toute la chaîne qui est déséquilibrée. De plus en plus d’agriculteurs reconnaissent l’utilité du renard. Un seul individu dévore entre 5 à 6000 campagnols par an. De ce point de vue, il devient un précieux auxiliaire. Bien sûr, personne ne nie qu’un renard dans un poulailler peut faire un carnage mais il est si facile de fermer la porte le soir!
La Salamandre a choisi de publier cette terrible photo lauréate du concours Wildlife 2015 où le photographe canadien Don Gutoski a capté un renard roux est en train de dévorer un renard polaire. Elle montre le drame du réchauffement climatique. Le territoire du renard roux s’étend de plus en plus vers le Nord et croise celui du petit renard polaire. Les prédations du premier sur le second sont de plus en plus fréquentes et menacent à terme l’espèce polaire.
Le magazine accorde également une belle place au Grand Cormoran, un autre mal aimé. Les 4 pages consacrées à l’oiseau pêcheur sont signées Alessandro Staehli et Federico Gemma pour les illustrations et les notes de terrain. Également au sommaire : une séquence images sur le vautour fauve, une autre sur les boulots en hiver, des brèves autour du climat, et une rando au bord du Doubs. Le mini guide s’intéresse aux traces des carnivores.
A noter encore, le jeudi 7 janvier 2016, l’émission La Tête au Carré (France Inter) sera dédiée au renard.
Plus d’infos ☞ www.salamandre.net
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15/12/2015 © Danièle Boone