Qu’est ce qu’on attend ?

Christophe Moyses
Et oui qu’est ce qu’on attend ? Si vous ne l’avez pas encore vu, le dernier film de Marie-Monique Robin est à voir absolument en ce début d’année. Elle nous raconte l’histoire d’un village d’un peu plus de 2000 habitants où les impôts locaux n’ont pas augmenté depuis 2005. Mieux la commune d’Ungersheim a économisé plus de 120 000 euros et a créé une centaine d’emplois. Un miracle ? Non mais la volonté sans faille de Jean-Claude Mensch, son maire, qui a fait d’Ungersheim, un village en transition, engageant toute la communauté dans un défi intitulé 21 actions pour le 21ème siècle. Vous l’aurez compris, ce qui se passe à Ungersheim est un modèle à suivre de toute urgence.

Ungersheim (68)
☞ Ungersheim est à 15 km de Mulhouse. Après présentation de quelques habitants apparaît Richelieu, le cheval de trait qui emmène les enfants à l’école. Puis on retrouve une classe de CM1-CM2 à la mairie qui présente le résultat d’un an de « réflexion citoyenne » des élèves. « Si nous pouvions ajouter un droit à la convention internationale des droits de l’enfant, ce serait : avoir le droit d’habiter sur une planète propre où la biodiversité est préservée. » Suit un échange sur le concept de transition. « C’est lutter contre le réchauffement climatique en diminuant les émissions de CO2. » Ungersheim réussit la prouesse d’émettre chaque année 600 tonnes de gaz à effet de serre en moins. Comment ? C’est ce que l’on découvre tout au long du film.

Jean-Claude Mensch, maire d'UngersheimJean-Claude Mensch se définit comme un enfant de la potasse. Il a été mineur pendant 35 ans, de l’âge de 17 ans jusqu’à 52 ans. Toute sa vie, il a été dans l’engagement militant. Il est maire d’Ungersheim depuis 1989. Ce végétarien qui ne boit pas d’alcool a réussi à faire passer ses idées mais aussi à les réaliser. Parmi ses réussites : le trèfle rouge, un jardin en maraîchage bio installé sur un terrain communal de 8 hectares qui fournit en légumes bio et solidaires la cantine scolaire et des paniers de légumes pour les habitants; une régie municipale agricole qui teste la permaculture ; la filière de la graine à l’assiette qui transforme les légumes impropres à la vente et produit des repas ; une régie de l’eau ; une monnaie locale ; une centrale voltaïque installée sur une friche industrielle de 5 hectares qui fournit de l’électricité pour 10 000 habitants ; un écoquartier… Alors comme le dit un des jeunes élèves : « Je suis fier d’habiter ce village parce que lorsqu’il n’y aura plus de pétrole, nous on saura mieux se débrouiller. »

Centrale photovoltaïque
Christophe et Lili Moyses, un couple de paysans boulanger extraordinaire, respire le bonheur. Fils et petit fils de paysan, Christophe avait repris la ferme familiale. Après mûre réflexion, il décide de tout changer malgré les quolibets des confrères et l’incompréhension paternelle. « Je ne supportais plus de travailler pour enrichir des entreprises chimiques. Je ne supportais plus de nourrir des animaux. Je voulais nourrir des humains. » Aujourd’hui, il ne cultive que des céréales anciennes, d’avant 1900. Il a récupéré des graines dans le réseau « semences paysannes » et les multiplier patiemment, gardant les variétés les mieux adaptées à ce petit coin d’Alsace. Il nous explique et nous montre pourquoi avec ces blés durs, il n’y a pas besoin de désherber. En effet, ils sont suffisamment hauts et denses pour étouffer les adventices. Il choisit également des variétés dites barbues car les animaux, les sangliers notamment, ne peuvent pas les manger.

Cheval
Ces variétés anciennes ont été abandonnées car elles n’étaient pas adaptées à la mécanisation de la fabrication du pain. Des variétés tendres possédant de grosses molécules de gluten ont alors été sélectionnées. Lili qui fait le pain à la main et prend un plaisir évident à travailler la pâte explique qu’au début des clients intolérants au gluten lui achetait du pain de sarrazin mais, ayant goûté son pain de blé, ils ont découverts qu’ils le digéraient bien. Du coup, ils peuvent se faire plaisir de nouveau avec du vrai bon pain comme autrefois sans avoir de problèmes de santé, bien au contraire.

« Le premier pas d’un programme de transition, c’est d’inciter les gens à réfléchir pour qu’ils se rendent compte qu’il n’y a pas que la fatalité même si les actualités sont effrayantes, remarque Christophe Moyses. On peut mettre les cartes sur la table et chercher s’il y a des solutions. Dès qu’on rentre dans cette démarche, des solutions, on en trouve. On n’est pas obligé de continuer à courir vers le mur. »

Alice SchneiderParmi le casting, notons Alice Schneider, cette habitante de 84 ans, pétillante et pétulante, qui annonce avoir envie de tout et surtout d’être active pour faire avancer les choses; Sophie Haby, 23 ans, benjamine du conseil municipal, en charge du photovoltaïque ou encore l’agriculteur sceptique qui siège pourtant au conseil municipal. Il confirme le changement climatique. « On le voit tous les matins. Cette année, le maïs, on l’a entièrement fabriqué avec l’eau. Mais quoi faire à la place ? » conclut-il alors que partout autour de lui, naissent des solutions. Un des temps fort du film est la visite à Ungersheim de Rob Hopkins, le fondateur du mouvement des villes en transition.

La transition est communautaire affirment encore les habitants de Ungersheim. Seul, on ne peut pas changer le monde, mais à plusieurs, si. On les voit construire ensembles les maisons de paille et de bois de l’éco-quartier. Et lorsqu’on a mis le pied dans un engagement vertueux, toutes les nouvelles initiatives sont une part de bonheur en plus qui engendrent de l’enthousiasme.

Affiche



Qu’est-ce qu’on attends ?

un film de Marie-Monique Robin
M2R Films

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02/01/2017 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte est soumise à autorisation.