Assouan est une ville délicieuse. Combiner un séjour dans la capitale nubienne et une croisière sur le lac Nasser, c’est découvrir l’Egypte d’Agatha Christie, au fil des temples sauvés des eaux, loin des foules du Nil.
Une felouque sur le Nil. Image d’Épinal ou plutôt d’Assouan. La ville mérite bien davantage que la demi-journée laissée aux touristes après leur marathon des temples. Il y règne une atmosphère particulière, plus douce, plus lente que dans le reste de l’Egypte. C’est que nous sommes en Nubie, la terre des Pharaons Noirs.
L’île éléphantine est le noyau originel autour duquel s’est bâti Assouan. Les archéologues ont récemment retrouvé sous ses berges les vestiges du port antique. Non loin de là, se trouve l’une des plus grandes carrières où l’on peut encore voir une obélisque inachevée. C’est donc ici que ces sortes de mégalithes étaient chargés sur les bateau pour rejoindre Karnak, le grand temple de Louxor. La prouesse technique continue à défier notre imagination. L’île est un village nubien. Pour s’y rendre, il faut prendre un improbable bac et se mêler à la population. Du coup, peu de visiteurs s’y aventurent.
Peut-être à cause de cela, l’île éléphantine est l’un de mes endroits préférés à Assouan. Il y a bien quelques femmes qui vous engagent à les photographier avec leurs enfants contre de l’argent, ce qui met toujours mal à l’aise. On est partagé entre l’envie d’aider et le refus d’être un porte-monnaie ambulant. Ces rencontres dérangeantes restent très marginales. Nous sommes plutôt dans un authentique paisible. Dans un petit chantier naval, on répare les bateaux. Les felouquiers bichonnent leur embarcation et vous invitent volontiers à partager un thé. La rotation est organisée en fonction du nombre de touristes afin que chacun puisse partager la manne. Alors les jours chômés, on passe le temps. En fin de journée, j’aime me rendre sur la terrasse de l’unique café au bord du Nil juste pour admirer le ballet des felouques au coucher du soleil. C’est vraiment magique. On y rencontre quelquefois d’authentiques voyageurs qui ont su surseoir aux préjugés. Le bruit court parmi les touristes qu’il serait dangereux de s’aventurer dans l’île sans guide, ce qui est absolument faux bien sûr!
D’Assouan partent les croisières sur le lac Nasser. Trois jours pour atteindre Abou Simbel. Les bateaux glissent sur une eau lisse, d’un bleu profond comme la nuit. Les autorisations de navigation sont données avec parcimonie. Cela change du trafic intense du Nil. J’imagine que cela ressemble à ce qu’était le fleuve au temps d’Agatha Christie. Et puis, voyager sur le lac Nasser, c’est aussi naviguer au gré des fantastiques temples sauvés par l’Unesco. Durant les travaux, de 1960 à 1965, cinquante pays ont participé à une extraordinaire lutte contre le temps pour démanteler et remonter sur de nouveaux sites, les plus beaux, menacés par la mise en eau du barrage.
La visite de ces temples magnifiques se fait dans des conditions de rêve. Jamais plus d’un bateau ne s’arrête. Et hors saison, le remplissage dépasse rarement 50%. Résultat: les sites nous appartiennent!
Sous l’impulsion de l’égyptologue Christiane Desproches-Noblecourt, la France a pris en charge le spectaculaire sauvetage du temple d’Amada, 25 m de long sur 10 m de large, le plus anciens des temples nubiens. Trop fragile pour être démonté, il fut soulevé d’un seul tenant et transporté sur une voie ferrée spéciale à trois kilomètres de sa position originelle. A l’intérieur, les peintures sont incroyablement bien conservées.
Plus loin, Wadi Es-Sabouaa, avec son allée des sphinx, s’élève au milieu d’un désert vallonné de sable rose et de roches noires. Le site est sublime, moins grandiose peut-être que Abou Simbel mais terriblement attachant.
La charrette est destinée au transport des touristes âgés ou fatigués. Le conducteur peut largement récupéré entre deux vagues de visiteurs. Certes, il n’est pas débordé mais la concurrence étant inexistante, il doit finalement s’en sortir pas si mal!
Oui Abou Simbel est grandiose mais j’avais gardé le souvenir d’un voyage très ancien. Rares étaient ceux qui venaient jusque là. J’étais arrivée au petit matin après de longues heures dans un bus à moitié vide. Nous étions une dizaine sur le site. Les premiers rayons de soleil éclairaient la pierre rose. C’était magique. Maintenant, il y a des avions, des hôtels, des barrières, du bruit… C’est l’envers du décor, le succès d’une destination. Heureusement, le soir pendant le dîner, le bateau a levé l’ancre pour s’installer face au site illuminé. Quel spectacle! Du coup, mon souvenir ne s’est pas trop dégradé.
Passer à l’acte
Les Voyages de Pharaon proposent des voyages sur mesure. Mohammed Salem, le patron, est égyptien. Il se fait un honneur de vous concocter le meilleur pour vous faire découvrir son pays! La preuve qu’il y parvient? De voyage en voyage, ses clients sont fidèles. www.voyages-pharaon.com
Assouan
Prolongez votre croisière sur le lac Nasser par un séjour à Assouan. Ne manquez pas la visite du musée de la Nubie. Remarquable muséographie et collection grandiose. Arpentez le souk et laissez vous tenter par les petits restos locaux. On y mange délicieusement bien et pas cher. J’ai un faible pour Al-Sayada Nefissa dans un renfoncement de la rue principale du souk. La petite terrasse avec les tables recouvertes de toile cirée à carreau est un havre de paix. Et, dans l’île éléphantine, offrez-vous le coucher de soleil depuis la terrasse de la « Nubian House »!
Quand?
La deuxième quinzaine de janvier est sans aucun doute la période la plus agréable. Le mercure affiche 22 – 23° et du point de vue de la fréquentation touristique, c’est tout à fait raisonnable.
11/12/2009 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte et des photos est soumise à autorisation
Bonjour Danièle
Je ne sais dans quelle partie du monde vous vous trouvez aujourd’hui ! Je souhaitais vous dire simplement que je viens de terminer mon article sur les Nubiens intitulé « De Souenet à Assouan » que vous trouverez sur mon blog. N’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez.
Bien cordialement
Jean-Marie
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Bravo! C’est un blog très érudit que je conseille à tous ceux qui s’intéressent à l’histoire de l’Egypte. Pour se connecter: deessehathor.canalblog.com
Merci pour la justesse de vos articles. Je suis allée en Egypte fin octobre 2009. 11 jours avec jet tours – « secret de kemet ». un groupe de 6 participants dont un couple ami. 3 jours sur le lac Nasser. Puis croisière sur le Nil. Magnifiques temples sur le lac et peu de monde!
Mon mari, moi-même et mes amis, avons contracté le virus de l’Egypte! Nous nous immergeons dans l’histoire égyptienne et espérons y retourner prochainement. Nous avons fait 950 photos!
Bravo Danièle votre article est excellent.
Seule petite remarque à propos du « bruit qui court parmi les touristes qu’il serait dangereux de s’aventurer dans l’île sans guide ». C’est très dangereux ces bruits qui courent. C’est une image toute faite totalement erronée. Il y a autant de sécurité ou d’insécurité que n’importe où en France. Les Nubiens sont des gens absolument charmants et accueillants.
Bien cordialement
Jean-Marie
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Tout à fait d’accord avec votre commentaire.
Si je fais l’éloge de l’île éléphantine et dis que c’est mon endroit préféré à Assouan, ce n’est pas tout à fait par hasard. Il me semblait donc implicite que ce n’était pas dangereux. Le bruit circule… en le disant, le but c’est de le démentir… Au cas, où un doute pouvait subsister, j’ai rajouté dans le texte un démenti formel.