La Cour Européenne vient de trancher : elle a donné raison aux Graines Baumaux SAS contre Kokopelli. Qu’est-ce que cela veut dire ? Tout simplement la victoire des semenciers qui ont pour profession de foi, la main mise sur le vivant. Ils le contrôlent, le commercialisent et… l’empoisonnent ! Depuis vingt ans, l’association Kokopelli fait un boulot de sauvegarde extraordinaire des variétés anciennes mais que serait ce travail, si ces variétés ne retrouvaient pas le chemin des jardins. Résistantes et goûteuses, elles sont aujourd’hui de plus en plus recherchées notamment par les ténors de la gastronomie. Oui mais voilà, la plupart d’entre elles ne répondent pas aux critères d’inscription sur la liste des semences autorisées à la vente établie pour nous protéger contre « les risques sanitaires et environnementaux »!
☞ Les semences enrobées des pesticides Cruiser, Gaucho et autres Régent, qui empoisonnent la biosphère et les populations depuis plus de cinquante ans, elles, sont inscrites au catalogue. Officiellement, cette liste est sensée éviter « la mise en terre de semences potentiellement nuisibles » (dixit la Cour Européenne). Nos parents, nos grands parents, nos arrières grands parents ont donc survécu par chance ! Mais de qui se moque-t-on ? Bref, vous l’aurez compris, cette décision rendue publique aujourd’hui, me met en colère. Ces gens devraient être jugés pour crime contre l’humanité mais, bien au contraire, ce sont eux, qui font et défont les lois.
Le plus révoltant est l’analyse étonnement superficielle qui justifie cette décision. L’expression « paradigme productiviste » y est utilisée 15 fois. C’est simple et on le sait mais c’est confirmé : la biodiversité est sacrifiée sur l’autel de la productivité. La Cour de l’Union Européenne s’affiche ainsi incontestablement au service de l’agriculture chimique mortifère. Cette décision arrive au moment où une réforme générale de la législation sur le commerce des semences est en cours. Mais les associations de sauvegarde de la biodiversité, les petits producteurs, paysans et jardiniers passionnés qui, à travers toute l’Europe, conservent clandestinement plus de variétés oubliées que tout ce que le catalogue des variétés appropriées n’en pourra jamais contenir, n’ont pas été invités à la table des négociations ! La nouvelle loi sera donc faite par les semenciers pour les semenciers et tant pis, pour le conflit d’intérêt dont il est à la mode de le dénoncer. Vandana Shiva, cette scientifique indienne de haut niveau avait tout compris dès les années soixante-dix. Sa conscience et son honnêteté l’ont incitée à abandonner une brillante carrière dans le nucléaire. Mais quand donc, sa lutte contre le lobby des semenciers et le droit à la vie, éclairera nos élites en plein délire de sauver la finance en achevant le vivant ?
Après cette décision catastrophique, prise en ce jour de fête nationale française, au cœur de l’été, l’association Kokopelli qui lutte de procès en procès, pour le droit élémentaire à la biodiversité de nos assiettes et de notre environnement, donc notre santé, pourrait bien disparaître dans le silence généralisé des médias. Comment soutenir Kokopelli ? En adhérant massivement – le nombre des adhérents a un réel impact – , en diffusant le plus largement possible cette information qui va bien au-delà de la simple condamnation d’une association et en faisant pousser dans son jardin des graines interdites et en faisant déguster les fruits défendus. Et ceux qui n’ont pas de potager, peuvent les offrir aux jardiniers de leur entourage y compris les citadins qui cultivent le rebord de leur fenêtre.
☞ www.kokopelli-semences.fr
☞ A relire sur ce blog : Wangari Maathai, Vandana Shiva et les autres
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14/07/2012 © Danièle Boone – Toute utilisation même partielle du texte est soumise à autorisation
Incompréhensible et criminel.