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Un plan loup à contre courant

C’est comme si plus les signes du dérèglement climatique et de la baisse de la biodiversité sont visibles, plus nos gouvernants prennent des décisions suicidaires. Récemment nous avons dépasser la limite planétaire du cycle de l’eau, celle qui coule dans les cours d’eau, les lacs, les nappes phréatiques. La notion de limite planétaire est développée depuis 2009 par le Stocholm Resilient Center.  Neuf grands processus biophysiques et biochimiques dont la perturbation par les activités humaines menace la stabilité et la résilience du « système Terre » ont ainsi été répertoriés. Nous venons donc de dépasser le 6ème. Les hydrogéologues tirent les sonnettes d’alarme sur le fait que les nappes phréatiques ne sont plus remplies pendant l’hiver. Mais nos gouvernants et leurs partenaires économiques continuent à promouvoir les mégabassines au prétexte justement de l’abondance d’eau de l’hiver, de l’eau perdue disent-ils ! Ce n’est même plus une solution à court terme, c’est une fuite en avant et, plus grave, du vol organisé d’un bien commun vital, l’eau !

Aujourd’hui, mais ce n’est pas nouveau, le complot est contre le loup, bouc émissaire qui cache le lamentable état de l’élevage d’ovins en France avec ses troupeaux toujours plus grands, abandonnés à eux mêmes, qui surpâturent les estives déjà mises à mal par la sécheresse et la canicule. Donc l’État vient de rendre public le plan d’action national loup 2024-2029, un document scandaleux. « Les points d’engagement de l’État concernent la modification du statut du loup et son déclassement d’espèce strictement protégée, la facilitation des autorisations et modalités de tirs, aboutissant à une augmentation des destructions de loups à proximité d’élevages subissant très peu d’attaques. Alors que ce PNA (plan national d’action) devrait garantir la bonne conservation de l’espèce en France tout en assurant le soutien et l’accompagnement du pastoralisme, il n’est fait mention que des impacts négatifs de la présence du loup et pas des bénéfices qu’elle apporte, notamment pour la régulation des populations de grands ongulés nécessaire au bon fonctionnement des écosystèmes forestiers. En outre, ce plan contient de nombreuses inexactitudes et des affirmations mensongères, en particulier sur l’état de conservation de l’espèce en France et sur le bilan des dommages. »

Je comprends et soutiens donc les 6 organisations de protection de la nature (dont je viens de citer un extrait de leur communiqué de presse), WWF, LPO, FNE, FERUS, ASPAS, Humanité & Biodiversité, représentées au Groupe National Loup  qui ont décidé leur retrait de cette instance consultative. Force est de constater que tous les efforts de dialogue des défenseurs de la vie sur terre, et cela dans toutes les instances administratives, tout comme la voix de la population à travers les enquêtes publiques, sont sans cesse bafoués. Mais, du coup, se pose la question de comment agir maintenant ? Face au constat de l’absence totale de démocratie au profit du système oligarchique du moi d’abord, peut-on échapper à la radicalisation des luttes ?

Pierre Rabhi : une belle personne s’en est allée


La disparition de Pierre Rabhi me rend très triste. C’est une lumière qui s’est éteinte, un sage diront sans doute certains. Les voix singulières comme la sienne sont précieuses surtout dans les temps troubles que nous vivons. Il savait trouver les images pour faire passer les messages, le colibri bien sûr qui a, depuis, été réutilisé à toutes les sauces, mais aussi la sobriété heureuse. C’est tellement plus beau que la décroissance. La joie, le bonheur, faisaient partie de ses quêtes. Vivre avec moins, en harmonie avec soi-même et la nature, rend en effet mille fois plus heureux que l’avidité et le toujours plus.

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Edgar Morin et Pierre Rabhi : les frères d’âme

Lorsque deux sages se rencontrent pour la première fois et discutent du monde pendant cinq heures, cela donne un livre lumineux qui se lit d’une traite, comme si on était là, assis dans le canapé voisin à les écouter. Denis Lafay a orchestré cet échange. En fait, il est le troisième larron de cette conversation hors du commun. Edgar Morin va avoir 100 ans, Pierre Rabhi, 83 ans. Ce qui semble incroyable, c’est que les chemins des ces deux « frères d’âme » ne s’étaient croisés que très rarement et toujours très brièvement. «.Nous nous sommes en effet très peu vus de manière physique, mais nous nous sommes souvent approchés psychiquement, intellectuellement et émotionnellement. Voilà ce qui est important : cette sorte de convergence profonde entre nos deux vies et nos deux pensées » confirme Edgar Morin.

Les voilà donc là, tous les trois, dans un salon d’un établissement montpelliérain alors que la Covid est venu rappeler à l’homme qu’il n’était finalement pas grand chose. « Plus nous nous croyons maîtres de la nature, plus nous en dépendons » constate Edgar Morin. Pierre Rabhi aurait pu faire la même réflexion. La modernité, la technique, la communication, la mobilité, la répression, la violence, le diktat de l’économie, le calcul pire que le profit, la démocratie, le réchauffement climatique, la perte de biodiversité… sont autant de sujets abordés. Leurs paroles d’hommes libres et lucides pulsent une énergie bienveillante dont on a bien besoin dans ce temps de perte de repères. Espérons avec eux, pour l’humanité et pour nous, que la «.détermination de poursuivre le combat de vivre » l’emporte sur « la tentation du désespoir ».

Frères d’âme – Edgar Morin et Pierre Rabhi
Entretien avec Denis Lafay, éditions de l’Aube, 170 pages, 17,60 € www.editionsdelaube.com

Et si ma fourchette pouvait sauver la planète

Voilà un livre paru aux éditions du Rouergue auquel j’adhère à 100.%. Marion Haas, l’autrice est une ancienne élève de Sciences Po Paris qui a fondé avec son mari une ferme en biodynamie dans la Drôme en 1987. Autant dire qu’elle sait de quoi elle parle. D’évidence, chacun peut décider du contenu de son assiette. Si elle est composée d’éléments sains, elle sera goûteuse, bonne pour la santé et celle de la planète. « Je n’ose pas utiliser le mot traditionnelle tant il est galvaudé, ni le mot normale, tant il me semble anormal de ne pas manger sainement » écrit l’autrice en parlant de l’alimentation d’une grande majorité de consommateurs. Je m’étonne toujours moi aussi que le bien manger ne soit pas un objectif prioritaire d’autant que les méfaits de l’alimentation industrielle sont désormais parfaitement documentés et que l’information est accessible à tous. ☞ lire la suite

Agir!

Agir, il n’y a pas d’âge pour l’engagement. Milan jeunesse.Voilà un petit bouquin* pour de grandes idées… Destiné aux ados dès 11 ans, les adultes peuvent aussi s’en inspirer. Le sous-titre, il n’y a pas d’âge pour l’engagement, fonctionne dans les deux sens.  Pourquoi j’aime ce livre ? Parce qu’il donne des tas d’infos, d’adresses, de conseils pour les démarches à effectuer sans jamais être autoritaire. Les auteurs, Marie Taillan et Lucie Albon, font le tour de la question en s’appuyant sur des témoignages.

Négliger les petites choses sous prétexte qu’on voudrait en faire de grande, c’est l’excuse des lâches, écrivait Alexandra David-Neel. Agir,  ça peut être plein de petits trucs. Faire du soutien scolaire: si on est fort dans une matière, on aide les copains qui pataugent. On peut aussi faire de la lecture à haute voix pour les personnes âgées, partager le transport scolaire avec ses voisins ou nettoyer la plage. Les plus entreprenant peuvent se lancer dans la création d’une association, créer un club CP,  convaincre sa commune d’adopter une éco-attitude ou son école à participer à un éco-parlement de jeunes, etc.

Agir, c’est intervenir, c’est dire non à la fatalité et, à lire cet ouvrage, on s’aperçoit que finalement ce n’est pas le bout du monde, c’est même à la portée de tous. Fabrice Nicolino dont j’apprécie énormément le travail, raconte sur son blog  comment une dame de 71 ans ayant découvert Guerilla Gardening (groupe de jardiniers sauvages qui, la nuit, nettoie et replante un peu de verdure dans des endroits délaissés en milieu urbain) est entrée dans la danse. En une nuit, elle a transformé une jardinière servant de dépôt d’ordures en une petite merveille pleine de capucines et de roquette… En plus elle a su convaincre le fleuriste du coin de l’aider… C’était sa première action… Elle continue. J’emprunte à Fabrice sa conclusion, je ne ferai pas mieux !  : Quiconque relève la tête, dans ce monde soumis et malade, est non seulement un rebelle, mais aussi un espoir. Un grand espoir.

* Agir, il n’y a pas d’âge pour l’engagement par Marie Taillan et Lucie Albon, Milan jeunesse, 13 €